Cette année, le Tour de France passe pour une énième fois par les cols légendaires du Tourmalet et d’Aspin, au cœur du triptyque pyrénéen. Ces deux sommets ont été le théâtre de plusieurs exploits historiques dans la compétition, dont le premier fut l’œuvre d’Octave Lapize. Un champion pourtant oublié du public.
Octave Lapize, champion méconnu
Le passage du Tour de France 2015 dans les Pyrénées sera marqué par une 11e étape au départ de Pau jusqu’à Cauterets, dans la Vallée de Saint-Savin. Cet épisode verra surtout les coureurs franchir les deux cols mythiques d’Aspin et du Tourmalet, véritables patrimoines de la Grande Boucle. Ces deux sommets sont certainement les cols les plus escaladés du tracé du Tour de France. Depuis 1947, le Tourmalet a été gravi pas moins de 54 fois par les coureurs du Tour, dont plusieurs champions comme Eddy Merckx « Le cannibale », Christopher Froome ou encore Alberto Contador.
Derrière ces noms ronflants qui ont dominé les sommets des Pyrénées se cache un champion souvent oublié quand il s’agit de nommer les compétiteurs qui se sont signalés sur le col du Tourmalet. Ce coureur a pourtant marqué l’histoire des mythiques cols des Pyrénées à sa façon… dès le premier passage du Tour dans ces hautes montagnes. Le champion en question n’est autre qu’Octave Lapize, un coureur aux multiples surnoms qui a été le premier à remporter le « cercle de la mort », l’une des étapes les plus difficiles jamais courues sur la Grande Boucle.
La première du « cercle de la mort »
Octave Lapize entre dans l’histoire du Tour un fameux 21 juillet 1910, au cours de la 10e étape d’une édition qui traverse pour la première fois les hauts sommets des Pyrénées. Cette étape longue de 326 km relie Luchon à Bayonne et réunit en une seule épreuve les quatre grands cols des Pyrénées, à savoir dans l’ordre le col de Peyresourde, le col d’Aspin, le Tourmalet et le col d’Aubisque. Dès le départ, Octave « Le frisé » Lapize s’échappe et aborde l’ascension du col de Peyresourde en position de leader, suivi par son challenger Gustave Garrigou. Arrivant premier au sommet du premier col, il est rejoint dans la descente par Gustave Garrigou.
Commence alors un chassé-croisé entre les deux coureurs, considéré comme le premier grand duel du Tour longtemps avant l’explication entre Jacques Anquetil et Raymond Poulidor sur le Puy-de-Dôme ou le coude-à-coude entre Contador et Schleck sur l’escalade… du Tourmalet. Dépassant une nouvelle fois son concurrent français, « Tatave » arrive en premier au sommet du col d’Aspin… avant d’être rejoint dans la descente par Garrigou, meilleur rouleur. Vient ensuite le redoutable col du Tourmalet, qu’Octave Lapize franchit toujours en tête, non sans avoir mis pied à terre au cours de l’ascension. Rattrapé dans la descente par le régional François Lafourcade, le Frisé continue son festival jusqu’au pied du dernier col, l’Aubisque.
« Vous êtes des assassins ! »
A bout de souffle et certainement éreinté par l’immense effort exigé par l’épreuve, « Tatave » peste contre les organisateurs et lâche même une phrase devenue célèbre dans la légende du Tour. « Vous êtes des assassins. Oui, des assassins ! », assène-t-il aux organisateurs tout au long de l’ascension. Pour la première fois de la journée, il ne passe pas premier au sommet du col, devancé de 15 minutes par François Lafourcade. Ce dernier finit néanmoins par se fatiguer et doit se reposer plus de 4 minutes à la fin de la descente. En même temps, Octave Lapize récupère ses forces et rattrape le coureur originaire de Lahontan, dans les Pyrénées-Atlantiques, à quelques encablures de Bayonne. Le coureur parisien s’assure ainsi la victoire dans le « cercle de la mort », un succès décisif qui lui permet de remporter l’édition 1910 de la Grande Boucle.