Les montagnes et les cols des Pyrénées ont été le théâtre de plusieurs actes héroïques et mémorables au cours d’une étape du Tour de France. Le sacrifice de René Vietto lors de l’édition de 1934 en fait partie.
Une course historique
Le tour de France 1934 reste dans les annales comme l’édition au cours de laquelle un contre-la-montre individuel a été organisé pour la première fois, au cours de la deuxième moitié de la 21e étape. La compétition est encore disputée par équipes nationales cette année-là. Cinq nations ont donc aligné, une équipe composée chacune de huit coureurs, à savoir l’Allemagne, l’Italie, la Belgique, la formation mixte Suisse-Espagne et la France.
Vingt cyclistes individuels, chaperonnés par l’organisation du Tour prennent également le départ, donné au Vésinet. Parmi les coureurs de l’équipe de France figurent notamment Georges Speicher, Roger Lapébie, Antonin Magne – le leader – et René Vietto, jeune Cannois de 20 ans recruté pour ses qualités de grimpeur. Dès les premières journées de course, l’équipe de France écrase la concurrence en remportant les 7 premières étapes. Le leader de l’équipe de France, Antonin Magne, s’empare également du maillot jaune de leader du classement général dès la deuxième journée et le conservera jusqu’à la fin de l’épreuve. Mais à quel prix !
La malédiction d’Antonin Magne
Antonin Magne, malgré la domination de l’équipe de France, commence en effet à se faire rattraper peu à peu par son principal rival – le seul menaçant — : l’Italien Giuseppe Martano, à la veille de la 15e étape. « Thonin-la-méthode » aborde ainsi le départ de l’étape entre Perpignan et Ax-les-Thermes sous la pression d’un dépassement du leader du groupe italien au classement général. Au cours de l’étape, Magne accélère dans la montée de Mont-Louis, puis lors de l’ascension du col de Puymorens. Mais lors de la descente, le leader de l’équipe de France chute lourdement et casse sa roue avant. Le jeune Vietto lui donne alors son vélo, lui permettant ainsi de franchir la ligne d’arrivée avec seulement 45 secondes de retard sur Giuseppe Martano.
Le sens du sacrifice de Vietto
Le scénario se répète le lendemain, au cours de l’étape reliant Ax-les-Thermes et Luchon. Dans la descente du Portet d’Aspet, Magne tombe de nouveau et casse son vélo. « Le Roi René » se trouve alors déjà assez loin dans la descente du col. Il n’hésite pourtant pas une seule seconde et fait demi-tour dès qu’il aperçoit la chute de son leader. Cédant à nouveau son vélo à Magne, Vietto ne peut s’empêcher de verser des larmes qui marquent à jamais l’esprit des amoureux de la Grande boucle.
Son sacrifice permet néanmoins à Antonin Magne de conserver une avance significative sur Martano et de remporter le Tour de France 1934, son second titre après celui de 1931. Malgré ses trois victoires d’étapes, Vietto finit la compétition à la cinquième place du classement général. Le jeune Cannois peut néanmoins se consoler de son titre de meilleur grimpeur, grâce à ses succès d’étapes en montagne, notamment une course maîtrisée de bout en bout entre Tarbes et Pau, au cours de laquelle il domine tous ses concurrents sur l’ascension du Tourmalet, là même où Contador et Schleck se livrent à un autre duel de légende quelques décennies plus tard.