Pour la 81e édition du Tour de France, les observateurs et les bookmakers s’attendaient à un chassé-croisé entre le Roi Miguel Indurain et Tony Rominger, son dauphin l’année précédente. Le duel n’ayant pas eu lieu, le public a eu droit à un duel historique dans la montée du Hautacam.
Fin des débats avant l’heure
Le Tour de France 1994 s’inscrit dans la lignée de ces éditions de la Grande Boucle où le grandissime favori est connu dès le départ. Ce leader incontestable n’est autre que Miguel Indurain, vainqueur des trois éditions précédentes. Derrière l’espagnol, un contingent d’outsiders composés notamment de Marco Pantani, le romantique, Bjarne Riis, l’éternel poursuivant (au moins jusqu’en 1996), Armand de Las Cuevas, le fougueux et le prometteur Luc Leblanc, apparaissent comme des challengers sérieux au Roi Miguel. Ces derniers restent donc dans la roue du coureur espagnol durant les premières journées, espérant le talonner de près jusqu’aux difficultés de montagne.
L’Espagnol en décide autrement et frappe un grand coup dès la 10e étape, lors du premier contre-la-montre individuel entre Périgueux et Bergerac. Sur une distance de 64 km, le leader de l’équipe Banesto écrase la concurrence et s’octroie 2 minutes d’avance sur Tony Rominger et Armand de Las Cuevas à plus de 4 minutes. Le Tour semble dès lors joué pour nombre d’observateurs. Le passage du peloton dans les Pyrénées ne fait que confirmer ce constat, même si le spectacle est au rendez-vous. Quelques coureurs continuent néanmoins d’y croire et continuent de batailler contre le Roi Miguel, notamment dans l’ascension d’Hautacam.
Une première à Hautacam
L’avance glanée par Indurain lors du contre-la-montre a contrecarré les plans de ses rivaux, qui n’ont d’autres choix que de se démarquer sur les étapes de montagne pour marquer l’histoire du Tour. Les coureurs du groupe de tête affichent dès lors leur panache dès l’arrivée dans les Pyrénées lors de la 11e étape entre Cahors et Lourdes-Hautacam. Cette étape est le terrain de bataille idéal, sachant que la Grande Boucle s’attaque pour la première fois à l’ascension du Hautacam cette année. Les grimpeurs dans le peloton sont donc tous motivés à l’idée d’inscrire leur nom dans l’histoire de cette montée. Miguel Indurain, mélange d’Alberto Contador et de Christopher Froome, mais en un peu plus classieux, n’est pas en reste et ambitionne également de marquer son territoire au sommet de la station.
Ainsi, dès le début de l’ascension, l’Espagnol prend ses responsabilités et bien entendu passe à l’attaque. Tony Rominger ne parvient pas à suivre, à la différence des Français Richard Virenque, Luc Leblanc et Armand de Las Cuevas. Face à l’irrégularité du profil de la montée et la cadence imposée par le maillot jaune, seul Luc Leblanc garde le rythme et livre une opposition acharnée au Roi Miguel. Le public a alors droit à un magnifique coude-à-coude entre les deux grimpeurs. Contre toute attente, il place une accélération subite dans le dernier hectomètre et passe devant l’Espagnol, jusqu’à l’arrivée. Au final, le fougueux Limougeaud devance de 2 secondes le tenant du titre au sommet d’Hautacam et inscrit son nom au palmarès de cette jeune étape. Son coup de force ne lui permet pas toutefois d’inquiéter Indurain au classement général. Ce dernier s’envolera quelques jours plus tard vers son quatrième succès de suite sur le Tour.